« Pour sauver la France, je ne vois pas d’autre chemin que la coalition des droites. »
Par Seze (de) Richard le 5 octobre 2025 - 7 minutes
Restons Courtois, la nouvelle émission de Radio Courtoisie, a accueilli Marion Maréchal le 30 septembre 2025. Pierre-Alexandre Bouclay a conduit l’entretien, que nous reproduisons ici.
– Pierre-Alexandre Bouclay. Bonjour Marion Maréchal. Vous avez fait votre rentrée politique la semaine dernière à Paris avec un thème central, la droite qui gagne et qui gagne avec l’Union des droites. Pourquoi ce thème ?
– Marion Maréchal. J’ai envie de vous dire des raisons d’optimisme, de volonté, en tout cas, de redonner un peu d’optimisme aux Français qui sont bien légitimement désespérés par cette situation de blocage qui semble nous condamner à l’impuissance. J’ai voulu donner l’exemple d’un certain nombre de nos alliés européens, qui appartiennent au groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE), mon groupe actuel au Parlement européen, puisque nous avons à nos côtés pas moins de six gouvernements qui participent aux affaires dans leur pays respectifs, nous avons plusieurs chefs d’État dont la plus connue est l’italienne Giorgia Meloni. Elle nous a fait l’honneur de nous transmettre un message vidéo à l’occasion de cet événement dans lequel elle explique finalement que l’une des recettes de son succès, de ses réussites, c’est d’abord une méthode de gouvernement, avec une coalition des droites la plus large possible qui va en l’occurrence du centre droit jusqu’à la droite nationale. C’est comme si aujourd’hui, en France, vous aviez une coalition allant d’une partie d’Horizons jusqu’à Éric Zemmour. Donc ça semble de la politique fiction, en France ! Mais en Italie, c’est une réalité. La différence entre les Italiens et les Français, c’est qu’en France nous avons eu Chirac et qu’eux ont eu Berlusconi, qui a fait le choix dans les années 80 de briser le cordon sanitaire avec la droite nationale, là où à l’inverse Chirac a fait le choix de le renforcer. Il y a eu des stratégies politiques, il y a eu des choix humains et c’est vrai que Giorgia Meloni était à 4 % face à un Salvini à 30 % avant de renverser le la vapeur. Donc je crois qu’il y a des leçons à tirer et j’ai voulu utiliser la référence qu’est devenue de Giorgia Meloni
pour que ce message soit plus fortement entendu.
– Jean-Yves Le Gallou. Effectivement, un des principaux problèmes de la France au cours des trente dernières années a été le cordon sanitaire. Mais il se trouve que quand il y a eu des tentatives pour briser ce cordon, pour franchir le Rubicon, l’accueil n’a pas toujours été très bon. Je vais prendre quatre exemples : Nicolas Dupont-Aignan, en 2017, et qui n’a pas été très bien traité ; Éric Zemmour, en 2022, au deuxième tour ; Éric Ciotti, en 2024, et d’un certain point de vue vous-même, même si vous aviez un passé de l’autre côté du cordon sanitaire. À chaque fois, on ne peut pas dire que l’accueil a toujours été très bon, aussi bon qu’on aurait pu l’espérer de la part de la formation principale, à savoir le Rassemblement national qui aurait tout intérêt à ce que le cordon sanitaire se rompe mais qui n’a pas forcément très bien traité les gens qui étaient prêts à le rompre le cordon sanitaire. Comment l’expliquez-vous ?
– Marion Maréchal. Je ne vais pas vous surprendre puisque vous savez que c’était justement l’une des divergences fondamentales que j’ai pu avoir avec le Rassemblement National quand j’y étais puisque j’ai, moi, toujours milité pour la coalition des droites, et je n’ai pas changé d’avis ; mais je n’ai pas changé d’avis par orgueil intellectuel ou parce que je me complairais dans des histoires sans lendemain. Je pense qu’un certain nombre d’étapes ont été franchies, et ce qui me rend peut-être un peu plus optimiste que vous, c’est parce que je ne vois pas d’autres chemins. J’aimerais en trouver d’autres, j’aimerais qu’il en existe d’autres, comme la grande alliance potentielle des souverainistes de droite et de gauche. Je trouve ça très séduisant intellectuellement mais ça n’a jamais débouché politiquement. À chaque fois les souverainistes de gauche, les Montebourg, les Chevènement, ont été premiers à courir pour appeler à voter Emmanuel Macron dès qu’ils le peuvent. J’entends d’ailleurs régulièrement Jordan Bardella et Marine Le Pen expliquer qu’ils ne sont pas là pour sauver la droite mais pour sauver la France. Je pense que ça nous fait un point commun : je ne me lève pas tous les matins en me disant « Mon projet dans la vie, c’est de sauver la droite ». Mon projet dans la vie, c’est de sauver mon pays, et accessoirement l’avenir de mes filles. Mais pour sauver la France, il faut battre la gauche. Et pour battre la gauche, je ne vois pas d’autre chemin que la coalition des droites, je n’en démords pas, et je vois quelques raisons d’être optimiste, même si les logiques partisanes continuent de dominer ; mais enfin, il reste deux ans avant 2027 et les choses peuvent encore évoluer. Je vous donne simplement ces raisons d’être optimiste. La première, c’est ce qui se passe au Parlement européen. Je sais que ça intéresse assez peu les Français mais c’est très intéressant parce que c’est essentiel, parce que déjà beaucoup de choses se décident là, évidemment, mais de surcroît parce que le groupe justement des Conservateurs et réformistes européens auquel j’appartiens a une délégation française dont je suis le chef et qui a permis, pour la première fois dans toute l’histoire du Parlement européen, que la droite nationale à laquelle de fait j’appartiens ne souffre pas du cordon sanitaire. C’est-à-dire que nous avons pu, d’autres élus européens et moi, faire passer des résolutions, des amendements. Pour la première fois justement parce que ce groupe, avec les Italiens de Fratelli d’Italia, est intégré dans les institutions européennes, a des vice-présidents de commission, etc., mais surtout fait des coalitions régulièrement avec le groupe PPE, de centre droit, auquel appartiennent les LR. Ce travail de coalition avec le PPE permet de constituer régulièrement une majorité à droite, grâce à l’ajout des voix du groupe du Rassemblement national ou du groupe ENS auquel appartient Sarah Knafo. Pour la première fois est mise à mal dans l’histoire du Parlement européen la traditionnelle majorité qui dominait jusque-là, la majorité d’Ursula von der Leyen, qui est censée aller du centre droit jusqu’aux socialistes voire même aux écologistes en passant par les macronistes. Régulièrement nous faisons tomber cette majorité grâce à une alternative à droite, grâce à ce groupe des conservateurs et sans sacrifier sur le fond. Si ça marche au Parlement européen pour la première fois, j’ai la faiblesse de penser qu’on peut tirer ça vers le la France.
L’autre raison qui, me semble-t-il, doit nous rendre optimiste, c’est que l’air de rien les lignes ont bougé chez les LR. Vous vous avez connu une époque, Jean Yves Le Gallou, où les choses étaient irréconciliables sur le plan idéologique avec Les Républicains. On se souvient de Nathalie Kosciusko-Morizet qui allait dans les manifestations antifas à Paris pour les soutenir, même sur les questions européennes, sur les questions du libre-échange. Il y a quand même aujourd’hui une convergence idéologique et moi j’ai entendu Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau, lors de leur campagne interne, expliquer d’une part que dorénavant le seul cordon sanitaire qui existait était face à LFI. Pardonnez-moi, ce n’est quand même pas une petite chose. C’est la première fois que c’est dit ! Et d’autre part que finalement la seule chose qui les empêchait aujourd’hui de s’allier au Rassemblement national c’était les questions économiques. Objectivement, si c’est la seule raison, je pense qu’on va trouver un modus vivendi.
Retrouver l’intégralité de cet entretien sur la chaîne YouTube de Radio Courtoisie.